«Qu’il vous reste de nous notre amour infini de la vie, de sa beauté et de sa légèreté, et que du fin fond de notre sommeil éternel, vous nous entendiez rire encore. Rire, chanter, danser et célébrer la vie. Nous l’avons tant aimée.» Un matin, un garçon d’étage de l’hôtel Lutetia, découvre un couple d’octogénaires, main dans la main, endormis pour l’éternité. Ce geste ultime et romantique, cette liberté qu’ils n’ont pas hésité à s’offrir a certes du panache, mais Ezra et Maud ont-ils pensé à leur fille Eléonore qu’ils laissent en proie à l’incompréhension et au chagrin ? Ont-ils seulement pensé à elle en planifiant leur mort spectaculaire, leur funérailles extravagantes, le legs compliqué de leur maison des Bulles ? Ultime coup d’éclat d’un couple de publicitaires, vendeurs de rêves, incarnations vibrantes des dernières décennies euphoriques du XXe siècle ou témoignage d’amour maladroit, absurde, tapageur mais d’amour malgré tout ? C’est drôle, c’est perturbant, c’est bouleversant, et Emilie Frèche signe ici son meilleur roman.
Editions Albin Michel / Prix: 21,90€ / Cultura / Amazon / Decitre
Mon avis
C’est un ouvrage que j’ai lu d’une autrice et qui m’a complètement entraîné dans son histoire autour de ce couple, inséparable, indissociable jusqu’à la mort. Cela peut paraître romantique, un choix assumé sur sa propre fin de vie. Cette histoire, inspirée par un vrai fait divers qui interpelle sur cette question, est mise en scène avec brio par une autrice qui maîtrise son intrigue.
J’ai été complètement happé par cette intrigue qui met donc en scène deux personnalités qui ne laissent personne indifférent: séduisants, prenant des risques et l’ombre de l’autre. C’est troublant parfois, hypnotique comme ces deux personnes arrivent à se fondre dans l’autre avec une sorte de facilité déconcertante. Une fusion complète laissant tristement leur fille unique derrière eux, qui se retrouve face au souvenir de cette sorte de monstre à deux têtes qui vivait sa vie avec panache, passion, mais pas sans conséquences. Certains passages sont émouvants, et l’égoïsme parental est grinçant, voir dérageant. C’est un succès bâti à deux, des concessions et un amour qui comme tout amour passionné, à sa tragédie.
Le personnage Eléonore est à la fois touchant, mais aussi parfois un eu horripilant de temps en temps par certaines répétitions concernant sa fatigue, sa jalousie presque qu’elle peut ressentir envers ce couple qui l’a complètement, et jusqu’au bout, maintenu à l’extérieur. Ses parents ont tout prévu, tout préparé pour garder la main mise sur la suite de leur histoire malgré leur absence et on suit donc Eléonore, qui fait face à tout cela et qui se rend compte qu’elle ne sait rien de ses parents, contrairement à son fils qui semble avoir réussi à attendrir ou en tout cas, à être plus proche d ses grands-parent ce qui va créer des frictions entre mère et fils, car Eléonore ressent le besoin de rejeter cet héritage qui provient d’une fusion qu’elle n’a jamais saisie. On peut comprendre évidemment toute la peine de ce personnage qui se retrouve seule, comme elle l’a toujours été, mais surtout qui ne pourra jamais se senti incluse.
La plume d’Émilie Frèche est très facile à lire, vraiment très agréable à découvrir et le couple est si hypnotique, que les pages se tournent avec une très grande facilité. l’autrice arrive à créer une histoire émouvante, jusqu’à la toute fin. J’ai aimé aussi qu’elle mentionne le fait divers qui l’a inspiré, car cette histoire inventée est tout de même posée sur une question sociétale importante : le suicide assisté qui n’est pas possible en France et qui laisse des recours terribles, quelle que soit la méthode.
Une lecture aussi hypnotique que le couple, aussi brillant !